• 8 mai 2025
  • N'Djamena

Idriss Youssouf Boy nie tout

Idriss Youssouf Boy nie tout

Le 7 mai 2025, le tribunal a ouvert une nouvelle audience dans l’affaire opposant About Hachim Bouder à Idriss Youssouf Boy, ancien directeur de cabinet du Président de la République. Le plaignant réclame à l’accusé la somme colossale de 11,9 milliards de francs CFA, dans une affaire portant sur des accusations de trafic d’influence, abus de fonctions, escroquerie et corruption. Toutefois, Idriss Youssouf Boy rejette en bloc ces allégations et nie toute implication, malgré la multiplication de témoignages contradictoires.

Arrêté en janvier 2025, M. Boy fait l’objet d’une plainte déposée par M. About Hachim Bouder, représentant légal de l’entreprise HBC, spécialisée dans les travaux publics, avec le soutien de M. Izadine Souleymane et de Mme Hadje Koubra Souleymane. Ils l’accusent de ne jamais avoir remboursé une somme de 11,8 milliards de francs CFA, qu’il aurait perçue sous forme de prêt au nom du Chef de l’État à partir de 2021. Malgré plusieurs tentatives de règlement à l’amiable par voie familiale, l’accusé récuse toute reconnaissance de dette. Il affirme n’avoir jamais rencontré les plaignants à ce sujet.

Lors de la deuxième journée d’audience, plusieurs témoins ont affirmé avoir accompagné M. Bouder au domicile de M. Boy pour récupérer les fonds litigieux. Noroti Taïro, l’un d’eux, a déclaré à la barre : « Nous étions cinq personnes chez M. Youssouf Boy. Il a reconnu avoir reçu des fonds de M. About, tout en ramenant le montant de 12 milliards à 9,9 milliards. » D’autres témoins ont corroboré cette version, précisant que l’accusé aurait dans un premier temps reconnu les faits, avant de se rétracter.

Convoqué à la barre, Idriss Youssouf Boy a maintenu sa position : « Je ne les ai jamais rencontrés », a-t-il affirmé. Interrogé par Me Pamkéré Wouzé, avocat de la partie civile, sur la crédibilité des témoins, l’accusé est resté ferme dans ses dénégations. Un témoin a rapporté que l’accusé avait d’abord évoqué un prêt, puis parlé d’une commission de 10 % sur un marché public attribué à HBC, avant de tout nier. Une proposition de recours au Coran pour trancher le différend a été immédiatement rejetée par la défense. Me Athanase Mbaigangnon a rappelé que seul le Code de procédure pénale devait encadrer le procès, un avis partagé par Me Djerandi Laguerre Dionro.

Pour Me Ngadjadoum Josué, avocat de la partie civile, « les témoignages parlent d’eux-mêmes, chacun s’est déjà fait une opinion ».

Sur le plan matériel, les preuves restent limitées. Les seules pièces à conviction sont quelques chèques non datés émis par HBC à l’ordre de « moi-même », tirés sur la Banque Commerciale du Chari (BCC), dont l’un d’un montant d’un milliard de francs CFA. Interrogé, le chef d’agence de la BCC a indiqué que de tels chèques pouvaient être traités avec l’accord de la direction, même sans respecter toutes les normes bancaires. Quant à la validité d’un chèque sans date, l’avocat de la banque a précisé : « La date n’est pas un élément déterminant pour qu’un chèque soit considéré comme valable. » Il demeure néanmoins incertain que ces chèques aient été encaissés par Idriss Youssouf Boy ou par About Bouder, aucun des deux ne les ayant endossés. Sollicité à ce sujet, le chef d’agence a précisé que la vérification de l’identité de l’émetteur relève de la responsabilité du gestionnaire de compte ou de la direction générale.

Dans ce bras de fer où chacun campe sur ses positions, la vérité, elle, reste encore muette. L’affaire a été renvoyée à une date ultérieure, en attendant le réquisitoire du ministère public et les plaidoiries des parties.

Ce procès met à nu les fragilités et la perméabilité de certaines sphères publiques à l’argent facile. Reste à savoir si la justice parviendra à restaurer la confiance.